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Etranges étrangers
11 janvier 2011

Un inconnu

Il a des yeux gris asséchés par le temps, vieillis pas les éléments, yeux ternes grouillant de bactéries, secouant leur poussière par des clignotements.
Yeux voilés, opaques, sans rétine ou avec des rétines atrophiées.
Il a un ventre flasque plein de grandes blessures ou de cicatrices, un ventre blanc qui n'a jamais vu le soleil, un ventre entrelardé !
Il a de grandes oreilles qui ne sont plus à l'écoute, des oreilles qui ont trop entendu les cris du monde, les appels des affamés, les révoltes des jeunes, les guerres avec éventration des femmes enceintes, les bombardements des villages frontaliers.
Il a des oreilles qui n'entendent plus ou qui entendent mal, il ne veut pas d'appareillage.
Il regarde la télé, parfois il sommeille, il mélange sa vie avec le peu qu'il voit.
Il écoute la télé, il entend mal certains mots, il reconstitue l'histoire, il fait référence à sa vie, il ne veut pas se perdre dans cette histoire ou bien ce film n'a rien à voir avec son film à lui qui repasse dans sa tête. Les images du passé reviennent très claires, très présentes, très stimulantes : parents et grands-parents, amis perdus, grands espaces de la montagne aux oliviers, gourbis, vaches et brebis.
Puis il ferme les yeux et les oreilles et il somnole !

Une grenade sur la table beige, très grosse, très luisante, rouge strié de noir.
Elle vient d'un autre continent, elle a fait un long voyage, elle a traversé la mer.
J'avais vu les orangers, les mandariniers, les oliviers, je n'avais pas vu de champs de grenadiers.
Des enfants naissent sur tous les continents, il grandissent, que mangeront-ils demain ?
Il faudrait éviter de ramener tout chez nous, les matières premières, les fruits, les objets artisanaux de plus en plus rares, les bijoux.
On ramène le maximum et surtout l'huile d'olive et eux, il leur reste l'huile de mauvaise qualité. Bien sûr, ils ont envie de vendre la bonne huile d'olive pour s'acheter une cuisinière ou une machine à laver ou bien tout simplement pour manger. Dans les villages, c'est le travail des intermédiaires de trouver des vendeurs d'huile et les voyageurs ne savent pas qu'ils privent la population d'une denrée bienfaisante pour la santé.
C'est peut-être encore le cas dans le bled : l'enfant demandait de l'huile à sa mère pour faire cuire les poissons qu'il avait pêchés et la mère refusait car il fallait économiser l'huile d'arachide. L'huile d'olive était toute vendue !

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